Mais qu’est-ce qui peut bien expliquer un tel déséquilibre ?  Plusieurs propositions de pistes :

× le rôle prescripteur de notre entourage -nous sommes influencés par les expériences de voyages des personnes que nous connaissons- mais également des émissions TV et de la presse spécialisée qui vont mettre en lumière des destinations convoitées.

× le développement exponentiel des compagnies aériennes low-cost joue également pour beaucoup dans le choix de notre destination, au même titre que les propositions des agences de voyages.

× la peur de l’inconnu et l’attrait pour des destinations balisées nous poussent vers ces lieux dont on a déjà vu 1000 clichés de rêve et à fort potentiel instragrammable.

D’ailleurs, pour les millenials (30-40 ans), le réseau social de partage de photos qu’est Instagram, se substitue petit à petit aux moteurs de recherche lorsqu’il s’agit de choisir sa destination de vacances. 40% des interrogés affirment déterminer leur lieu de vacances d’après son “instagrammabilité”*. Pour l’anecdote, un étudiant américain a même établi un parcours touristique aux USA, avec des marquages au sol pour indiquer aux touristes les endroits où se placer pour avoir la meilleure photo instagram.
Ces dernières années, ce réseau social se voit donc montré du doigt et accusé d’avoir ruiné les plus jolies destinations en popularisant des endroits à l’écart des sentiers battus.

 

SATURATION À TOUS LES ÉTAGES

Les effets du sur-tourisme sont ressentis à différents niveaux. A l’échelle mondiale, on peut citer de façon non-exhaustive quelques lieux à l’asphyxie ou déjà fermés pour préserver sa faune et sa flore:

  •  la célèbre plage Maya Bay en Thaïlande du film “La Plage” avec Leonardo Di Caprio (fermée)
  •  le Machu Picchu au Pérou (accès réglementé)
  •  l’île de Pâques et ses statues fragilisées (accès réglementé)
  •  les îles Galapagos
  •  Mont Kilimandjaro
  •  Mont Everest, «le dépotoir le plus haut du monde» (caution remboursée si les alpinistes reviennent avec leur matériel)
  •  Angkor les temples cambodgiens
  •  Les tombeaux égyptiens
  •  Pétra en Jordanie
  •  Taj Mahal (accès réglementé pour les touristes indiens!)
tentes népal

Plusieurs de ces sites classés au Patrimoine Mondial de l’Unesco ont vu les touristes affluer depuis que la précieuse reconnaissance leur a été décernée. Conscient de son rôle de prescripteur auprès des visiteurs et des conséquences subies par ces lieux d’exception, l’Unesco a établi une liste des sites en péril afin d’encourager des mesures correctives.

Pour exemple, la vieille ville fortifiée de Dubrovnik (Croatie) victime des bateaux croisières se voit menacée de perdre son classement au patrimoine mondial si elle ne limite pas l’accès quotidien à 8000 visites.

A l’échelle Europe, ce sont plusieurs destinations qui tirent la sonnette d’alarme depuis quelques années.

sur tourisme venise avec gondole

Barcelone qualifie de “calamité sociale” l’afflux incessant de touristes et rend payant l’accès à certains de ses parcs, Venise régule ses visiteurs par le biais de portiques (menacée par l’Unesco), Lisbonne dénonce une “touristification” qui expulse de la ville les locataires annuels au détriment des locations meublées pour touristes, le maire de Santorin demande de l’aide au ministre grec du tourisme pour limiter le nombre de visiteurs afin de protéger les vestiges de l’île, à Amsterdam les autorités ont stoppé la promotion de la destination et refusent l’ouverture de nouvelles boutiques de souvenirs et le canyon islandais Fjadrargljufur a dû fermer suite au clip de Justin Bieber tourné sur place, provoquant une affluence de 300 000 touristes, ravageant de fait la flore locale.

En plus des détériorations des monuments et des sites naturels, ce sont parfois les infrastructures elles-mêmes qui ne sont pas prévues pour absorber un tel taux d’occupation: approvisionnement en eau potable, gestion des déchets, coupures d’électricité,…

En plus des touristes qui ne trouvent pas leur compte dans ces conditions d’accueil détériorées et décevantes, ce sont des autochtones hostiles qui finissent par souffrir de tourismophobie. “go home” (“rentrez chez vous”) est un message plein de sympathie que l’on peut retrouver sur les murs de certaines de ces villes en souffrance…

Et en France, direz vous ?

Et bien la 1ère destination touristique mondiale n’est pas en reste.

Paris, Versailles, la Côte d’Azur, le Mont Blanc ou le Mont-Saint-Michel font face à ce même raz-de-marée de touristes… et ça commence à chauffer dans les plus beaux villages de province.

DOCTEUR C’EST QUOI LA POSOLOGIE ?

Pour contrecarrer ce phénomène, les acteurs du tourisme pensent différentes solutions: le “yield management” qui fait varier les prix selon les saisons et l’heure de la journée ou encore “les itinéraires de délestage” proposant des itinéraires bis pour faire découvrir d’autres lieux que les standards de la destination. Mais pour prendre le sujet à bras le corps, la solution est sûrement entre les mains du voyageur lui-même: il s’agit d’apprendre à voyager à contre-courant. Ça commence par le choix des destinations en privilégiant celles qui sont boudées (la Birmanie prisée il y a quatre ans est aujourd’hui désertée, le Kenya considéré à tort comme une destination de tourisme de masse voit la majorité des voyageurs privilégier la Tanzanie, qui du coup sature).
Opter pour Alger ; pour le Salento, sublime région méridionale d’Italie, quand tout le monde s’entasse à Venise ou sur la côte Amalfitaine ; s’aventurer à Détroit plutôt qu’à San Francisco ou à New York,… C’est également aller à l’encontre des saisons. Le début du mois de décembre, la fin janvier ou encore le beau mois de juin sont des périodes oubliées. 

Mais oui, encore faut-il pouvoir partir à ces périodes rarement plébiscitées par les ressources humaines et l’éducation nationale !…

POUR CONCLURE… SUR UNE OUVERTURE

54 % des 22 000 voyageurs interrogés par Booking pour son enquête annuelle ont affirmé chercher à « jouer un rôle dans la réduction du tourisme de masse ».  Encourageant, non ? 

Mais pourtant il s’agit de toucher à ce qui est le plus difficile de bouger : la facilité, notre budget, nos envies, notre confort, l’appartenance à un groupe. 

Par ailleurs, ce contexte de confinement, d’effondrement du marché aérien, de solidarité envers le tourisme local nous amène à nous questionner sur notre rapport au voyage et sur le touriste que nous souhaitons devenir, après. De quoi occuper nos soirées de confinés… Pour alimenter ce questionnement et cette (re)construction, Stitch revient très vite avec un nouvel article sur la notion de slow-travel et les alternatives autres de voyages.

Restez dans le coin !

 

 

 

*étude réalisée en 2017 en Grande Bretagne

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